| Editeur : Eidos
Date de sortie : 1999
Genre : Action
Plateforme de test :
Autres plateformes : |
Akuji
Chez Crystal Dynamics, on
aime les histoires d’esprits torturés
survivant après la mort dans le seul but de se venger. Après Legacy of
Kain, et avant Soul
Reaver, nous voilà plongés dans un royaume des
Enfers que Dante
lui-même n’aurait pas renié. Quel jeu !
« Nous sommes des grands fans du film
Angel Heart » avoue Jim Curry, de
Crystal Dynamics. « On est tombé dedans lorsqu’on était petits. Au-delà
de l’inspiration provenant du film, nous avons perçu que le Vaudou nous
procurerait un mythe et un scénario riches. La nature illicite de la
magie – l’utilisation de sang et les sacrifices – nous a
particulièrement attirés ». Pour cela, on peut lui faire confiance. Du
sang, vous en trouverez lorsque vous jouerez à Akuji the Heartless
-
pas suffisamment pour être écœuré, mais assez pour vous plonger dans
une atmosphère maléfique.
Il faut dire que le scénario a du
mordant. Un petit peu du mythe d’Abel
et Caïn mâtiné de la légende d’Orphée, le tout saupoudré à la mode
Vaudou, et
vous avez la recette. Tout commence par un sacrifice
diabolique. Afin d’augmenter ses pouvoirs de prêtre Vaudou, votre
propre frère, Orad,
vous fait arracher le cœur le jour même de votre
mariage. Celui-ci devait sceller votre union avec la belle Kesho,
cadette de la tribu Grimaldi,
et garantir par là même la paix dans la
région de Mamora.
Votre frère ne l’a pas voulu ainsi. Vous voilà donc
plongé dans l’au-delà. Kesho ne tarde pas à vous apparaître, implorant
votre retour le plus tôt possible. Vous devez revenir pour la sauver
des griffes d’Orad. Mais le Seigneur (ou Saigneur ?) des Enfers ne
garantira votre passage que si vous collectez pour lui les âmes des
plus puissants de vos ancêtres maudits.
Le scénario a le mérite de vous
impliquer dans l’action. Ce n’est pas
si courant. Afin que vous n’oubliiez pas les motivations d’Akuji,
celui-ci hurlera « Kesho !!! » quand vous le laisserez inactif un
certain temps. Une âme torturée. Un romantique aussi, qui criera de
nouveau le nom de son aimée lorsqu’il perdra une vie. Vous apprendrez à
le connaître au fil de ses récits, car il s’exprime (en anglais) au début de
chaque nouveau monde exploré.
La
claque visuelle
Mais bien davantage que le scénario, le graphisme en
3D haute
résolution séduit dès le début. Et d’abord la finesse des
traits du
personnage, qui pour une fois ne sont pas taillés à la serpe
polygonale. Pour ne rien gâcher, de
nombreux
effets de lumière se
reflètent sur la peau bronzée d’Akuji. Sans jamais en abuser, les
programmeurs s’en sont judicieusement servis pour renforcer une
atmosphère baroque et mystérieuse. Ici l’éclat d’une torche, là un
horizon rougeoyant ou un marais verdâtre. Sans parler des
effets de
transparence, qui bénéficient de la technique du
vertex morphing…
Que
l’on déambule en forêt ou dans des donjons, la variété et le réalisme
des décors ensorcelle. La profondeur de champ est au rendez-vous. Et
contrairement à
Tomb
Raider 3, où l’environnement laisse parfois un
arrière-goût d’artificiel, celui d’Akuji paraît plus naturel. Paradoxal
me direz-vous, puisqu’on se situe dans l’au-delà. Mais en faisant son
chemin à travers les niveaux, on a l’impression qu’il s’agit surtout
d’un univers altéré par rapport au nôtre. Un peu comme la quatrième
dimension.
Des zombies affreusement estropiés y côtoient des moustiques géants, et
l’on y rencontre des représentants de la Mort armés d’une faux aussi
bien que des gorilles. Chose incroyable, on s’aperçoit que les monstres
sont aussi bien rendus qu’Akuji. Avec une nuance toutefois : certains
sont mieux faits que d’autres – les
Chiens
d’Enfer ont par exemple un
museau trop pointu. En tout cas, c’est un vrai plaisir que de les
tailler en pièces à l’aide des
lames
rétractables du héros. Un vrai
tueur, cet Akuji. Il peut enchaîner des
combinaisons de coups
à une
vitesse hallucinante. La roulade à terre accompagnée d’un double coup
de pied n’a aucun secret pour lui. Son uppercut spécial lui permet de
descendre les ennemis se trouvant à la verticale, en appuyant
simultanément sur les touches de saut et d’action.
Il peut aussi
marcher à quatre pattes, se laisser glisser le long d’une corde,
escalader des filets le long d’un mur ou se pendre à des mailles
horizontales à la force des bras, puis prendre son élan pour se
propulser ailleurs. Quoi d’autre ? Eh bien Akuji peut aussi faire du
trampoline sur des filets ou sur des plantes rebondissantes, ou encore
pratiquer le deltaplane ! Cela ne vous suffit pas ? Il peut se
transformer en panthère. Cela ne m’est arrivé que deux fois en 11
niveaux (il y en a 14 en tout), et brièvement, mais l’
effet de morphing
est impressionnant. Et quelle puissance !
Pourtant malgré toutes ces prouesses, impossible de nager, de se
déplacer latéralement, ou d’enjamber des obstacles.
Un moteur
3D quasi-parfait
Une explication à cela : le moteur
3D utilisé. Une version améliorée de
celui de Gex : enter the
Gecko. Akuji est en fait un hybride entre un
jeu d’action et un jeu de plates-formes. La partie plates-formes
devenant prépondérante au fil de la progression. Son moteur 3D nous
permet de régler nous-mêmes l’angle de la caméra, à l’instar d’un Super
Mario sur N64 ou de Spyro
le Dragon. On peut même passer en vue
subjective : on voit avec les yeux d’Akuji, un viseur
s’affichant
lorsqu’on sélectionne un sort de projectile. Très utile, et d’autant
plus réaliste.
Vu la beauté du graphisme, on pourrait
s’attendre à une jouabilité
poussive. Bien au contraire. La maniabilité
est excellente, car la
fluidité se
trouve garantie par une animation sans saccade. Les sauts
sont précis et surtout orientables en plein vol : Akuji bondit très
haut. La plupart du temps, on peut ajuster la caméra derrière le héros
d’une simple pression. Mais la jouabilité se révèle tellement
instinctive qu’on finit par prendre l’habitude de le contrôler en vue
de profil ou de biais. Cela s’avère d’ailleurs parfois indispensable,
car on ne peut changer de caméra en pleine action. Le dual shock prend
ici toute sa valeur. Akuji réagit à ses moindres sollicitations, ce qui
garantit un confort de jeu rarement atteint. Le vibreur s’active
lorsqu’un monstre nous blesse. Bien sûr, il faudra un certain temps
pour trouver ses marques. On peut par exemple être surpris de
bénéficier d’un contrôle multiple sur les sauts : à la fois en hauteur,
(en maintenant le bouton adéquat enfoncé on saute plus haut), et sur la
direction. Mais une fois ce paramètre intégré, on acquiert une maîtrise
sur notre environnement qui nous servira jusqu’à la fin du jeu.
En plus de présenter des plates-formes
multiples, qui se dérobent sous
nos pieds, tournent sur elles-mêmes ou se penchent latéralement sous
notre poids, les niveaux recèlent aussi de nombreux mécanismes.
Des
pièges tout d’abord : épieux ensanglantés ou roues qui ne demandent
qu’à tout broyer sur leur passage, nous ou les monstres qui nous
poursuivent. Et puis des interrupteurs qu’il faudra déclencher en
tirant dessus, des réceptacles de pierres magiques à actionner, des
cordes à trancher, des parois à pousser ou des cristaux qu’on devra
briser. Et la liste est loin d’être exhaustive : les programmeurs ont
fait en sorte de renouveler continuellement les défis, qui ne sont
jamais prise de tête. Un vrai plaisir, d’autant que la musique se
modifie après chaque action importante ou si vous êtes en danger.
Dommage tout de même que l’on puisse
tirer impunément sur les monstres
à distance. Leur intelligence
artificielle ne leur permet d’éviter nos
tirs que si on entre dans leur champ de vision. Et apparemment, ils ne
voient pas aussi loin que nous. Résultat : le jeu ne devient vraiment
fun que lorsque l’on se fait surprendre par des monstres. Ils
combattent alors plutôt intelligemment, nous tournant autour pour mieux
percer notre défense, ou nous ajustant à coup de boules de feu. Mais
seuls les boss
de fin de niveaux sont vraiment maîtres de leur
territoire : pour tuer les autres monstres, il suffira la plupart du
temps de reculer pour les shooter à distance - à condition de ne pas
être à court de sorts.
La difficulté
globale, très progressive mais non modifiable, destine
Akuji à un large public. Comme le jeu ne comporte que 14 niveaux, on
parvient à le finir en une douzaine d’heures. Vingt si l’on décide de
collecter toutes les âmes de nos ancêtres sans exception. Après chaque
monde parcouru, un écran nous informe du rapport âmes
récupérées/restantes. Les perfectionnistes peuvent appuyer à tout
moment sur la touche start
pour revenir aux Vestibules
des Enfers (les
embranchements de mondes) et rechercher les âmes manquantes… et
pourquoi ne pas récupérer une ou deux vies en cours de route ! Malgré
sa durée trop courte, Akuji m’a littéralement scotché à l’écran. Comme
aucun autre jeu de ce type n’a su le faire.
"Avec
ses
lames rétractables, Akuji est l’un des héros les plus puissants du jeu
vidéo. Il combat à une vitesse hallucinante et fait preuve d’une
souplesse déconcertante."
Le Bestiaire des
Enfers
A chaque nouveau niveau, de nouveaux adversaires ! En voici
quelques-uns parmi les 30
du jeu :
Vers géants |
Ils existent en deux versions.
Certains vous attaqueront de près, d’autres projetteront des boules
d’énergie. |
Autruches |
Une
référence aux Chocobos ? Ces autruches ont un
comportement imprévisible et sont résistantes. |
Ames Damnées |
Avec leur faux et leur capuche, elles
personnifient la Mort. La couleur de leur robe change au fil des
niveaux, et leurs pouvoirs aussi : elles deviennent capables de se
dématérialiser pour réapparaître tout près de vous. Dangereuses,
spécialement près de leurs générateurs, des caisses décorées, ou près
de portes dimensionnelles. |
Moustiques
géants |
Ils
ne réagissent que si vous
pénétrez dans leur territoire. De piètres adversaires. |
Zombies |
Vous les trouverez en deux variantes, les sans-jambes
et les
sans-bras. Ils peuvent se reproduire indéfiniment dans les cimetières.
Détruisez alors leur générateur. |
Oiseaux-squelettes |
Ils
volent en cercle. Ne vous
mettez pas au milieu. Proviennent parfois de générateurs. |
Sorciers |
A l’instar des âmes damnées, ils
deviennent après quelques niveaux capables de se dématérialiser.
Spécialistes du combat à distance, ils expédient des boules de feu.
Vous pourrez pourtant les shooter de loin en toute impunité. |
Rhinocéros |
Ils
chercheront à vous éperonner à coup
de corne, modifiant au besoin la trajectoire de leur course.
Invulnérables à la magie. |
Centipèdes |
Ils sortent de leur trou les uns après les autres.
Tuez-les tous en vous baissant. |
Crânes
de démons |
Baissez-vous
également pour
ajuster ces crânes montés sur pattes, qui vous attaquent de biais pour
échapper à vos coups. |
Démons ailés |
Il en existe de différentes sortes.
Certains se mettent à la verticale pour vous plonger dessus, alors que
d’autres lévitent, vous lancent des sorts et se dématérialisent comme
les sorciers. Mettez la gomme pour les avoir. |
Serpents
volants |
Ces
petits serpents sont très
difficiles à ajuster et dangereux : ils lâchent des bouffées de gaz
empoisonné. |
Chiens d’Enfer |
Ils n’ont qu’une tête, mais comme Cerbère, ils
crachent du feu. Restez à distance. |
Devenez
Sorcier Vaudou
En progressant dans le jeu, vous accéderez à une magie (noire, bien
sûr) de plus en plus puissante :
Bouffée incendiaire |
Le sort le plus faible.
Une
simple boule d’énergie que l’on peut envoyer par rafales. Permet de
déclencher certains interrupteurs. |
Tourmente
mystique |
Une
boule d’énergie plus
puissante que la précédente, que l’on peut aussi envoyer en rafales. |
Rafale infernale |
Cette boule de feu est
très
puissante. Vos ennemis prennent littéralement feu devant vous. |
Chasseur
d’âme |
Une
boule d’énergie à tête
chercheuse. Très précieuse. |
Foudre Spirituelle |
Même effet que le
chasseur
d’âme, en plus destructrice. Elle peut passer à travers les murs. |
Briseur
de chaînes |
Lance
des éclairs sur les
ennemis à proximité. |
Nuée funeste |
Le sort le plus puissant.
Il génère
une explosion détruisant tout sur son passage. |
Sphère
foudroyante |
Capture
les ennemis dans un
faisceau affaiblissant. Faible portée. |
Rideau de flammes |
Très utile : non
seulement il
vous protège contre les attaques et vous permet de marcher impunément
dans de l’acide, mais en plus il incinère les ennemis s’approchant de
trop près. Durée très limitée. |
Bouclier
de sang |
Mon
préféré. Il ne vous protège
pas, mais vous permet de récupérer l’énergie des ennemis après les
avoir descendus. |
Verdict
: On peut regretter que les programmeurs n’aient donné des
facultés de perception aiguisées qu’aux boss de fin de niveau. Mais le
fun, la beauté des environnements, la jouabilité sans faille et
l’ambiance propulsent cet Akuji au rang d’incontournable.
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La haute résolution
fait enfin des merveilles
La souplesse du moteur 3D autorise tous les exploits
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Durée de vie trop courte, le jeu est
tellement bon ! |
Par Emmanuel Guillot